Quelle image la matière organique sédimentaire est elle susceptible de conserver de son environnement originel? L'exemple d'un lac eutrophe : Aydat (Puy de Dôme, France).
Résumé
La démarche mise en œuvre vise essentiellement à tester les possibilités de reconstitutions paléoenvironnementales via l'identification des marqueurs moléculaires, dans les sédiments. A cette fin, nous avons étudié la distribution de divers constituants biologiques (sucres, lignine, lipides) au long d'une carotte de 44 cm de sédiments superficiels du Lac d'Aydat couvrant environ 100 ans. La lignine, bien que peu abondante, marque une relative constance de la contribution des végétaux du bassin versant aux apports sédimentaires, avec une composition apparemment héritée de tissus mous d'Angiospermes. Inversement, les monosaccharides spécifiques des végétaux supérieurs (xylose, glucose cellulosique) qui ne se trouvent que dans quelques rares niveaux, y témoignent alors d'une préservation accidentelle. Les acides gras libres, ceux libérés par hydrolyse acide et par saponification, proviennent de stocks biogéochimiques différents et apportent donc des informations complémentaires. Seuls ceux libérés par saponification se montrent relativement stables dans le sédiment. A l'information sur les sources végétales primaires (lacustre/ terrestre) apportée par les acides linéaires saturés s'ajoute celle de divers marqueurs bactériens fonctionnalisés. Avec la profondeur, cette diversité moléculaire s'atténue, la signature des microorganismes méthanotrophes devenant dominante au détriment de celle des organismes qui les ont précédés durant la diagenèse. Au total, malgré de très importantes distorsions du signal biologique originel, certaines informations fondamentales apparaissent effectivement bien préservées. Cette préservation reste cependant le fait de combinaisons chimiques particulières (e.g. lignine, lipides) plutôt que de composés simples (e.g. acides gras). Les causes de la préservation de certains constituants demeurant malgré tout conjecturales, comme les polysaccharides pourtant réputés labiles